vert= yann
autre pour moi
L'éclair surgit la nuit sur la ville. L'enfant lui, est sur sa fenêtre. Je le regarde se balancer. Lui, il ne me voit pas, je suis caché dans la pénombre d'une ruelle où les réverbères grésillent. Rue de la pomme d'Adam, tel est son nom. J'aime à me promener le soir quand il n'y pas âmes qui vivent dans cette vieille ville, j'aime aller et venir au hasard de ces ruelles exigües. Je ne sors qu'une fois la nuit tombée, c'est effrayant comme je m'emmerde la journée. Bien sur en général le soir est vaguement le reflet de ma journée, mais là c'est différent. Ce petit garçon penché à sa fenêtre, regardant le ciel menaçant au travers d'un rideau de pluie scintillant me fascine.
Non en fait je n'en ai rien à foutre de ce môme. C'est de sa mère que je veux parler.
La petite pitoyable femme qui m'a enfermé depuis dix ans! Et son enfant, en fait je le hais, je ne peux plus le voir. Il me hante, son visage innocent, son allure guillerette, ses long cheveux blonds dansant dans le noir. Depuis bien trop longtemps je le supporte, depuis bien trop longtemps je les subis. Elle me dit souvent je t'aime, mais qu'importe, moi je suis amoureux de moi même, les autres ne sont pour moi que des images illusoires trainant dans ma vie, tels des souvenirs imprécis. Il faudrait de l'air à ma putain de vie, une étrange nouveauté, quelque chose qui me renouvelle . Je voudrais la quitter . C'est décidé demain je me casse.
Mais où pourrais-je aller? Je ne connais personne autre part. Certes se serait un soulagement pour moi, mais quand j'y repense à deux fois je me dis que les difficultés seraient bien trop insurmontable pour moi. Je pourrais me débrouiller seul un certain temps d'accord, mais un jour ou l'autre des chose que j'aurais eu du mal à effacer de ma vie referaient surface. Et là, probablement tout cela me sauterait au visage, au cœur, et mon existence perdrait toute sa valeur, autrefois glorifiante et sans cet orage. Cet orage criant sa folie se soir, cet orage qui me pisse dessus alors qu'un gamin que je refoule depuis longtemps m'a enfin remarqué moi, planté devant sa fenêtre. Il se dit probablement: « qu'est ce qu'il me veut, il ne me reconnait même pas! » Ça sert à quoi de le supporter lui et sa mère? Il faudrait que je leurs parle, que je leur dise que je n'en peux plus. Qu'il faudrait que je vire de bord, que je change de cap, ce n'est à n'en plus pouvoir tellement je me meure avec eux. J'irais ce soir jusqu'au bout de la nuit pour m'épuiser et m'effondrer dans le lit en rentrant. Et demain, comme à mon habitude je me lèverai sans y penser. Marie sera déjà levée, elle aura fait le petit déjeuner que je me farcis tout les matins depuis dix ans. Toujours dans sa robe de chambre rosâtre, flétrie par le temps, les cheveux décoiffés et le teint gras. Moche mais à la fois si belle dans son inconscience que moi, sombre idiot, je sois sa seule raison de vivre. Je m'installerai à table et rituel de chaque jour, elle déposerai ses lèvre gercées sur ma joue blafarde, laissant derrière elle une odeur dérangeante flottant dans la cuisine. Elle me rappelle ma grand-mère et finira peut être comme elle à moitié folle devant sa télé. Avalant médicaments sur médicaments, cuisant dans son jus et perdant la tête depuis ma fugue. Car, assis et adossé au mur de pierre du trottoir je viens d'entamer ma fuite. J'ai trouvé l'endroit ou elle n'osera jamais me chercher car elle n'en aurait pas la force.
Moi ma force m'abandonne, sous des trombes d'eau je me laisse tomber sur le sol. Mon esprit s'enfuit par bribes de temps dans les méandre de l'inconnu. Mes yeux se ferment alors, trop las de n'avoir rien à regarder, rien de beau, plus rien d'admirable. Mon bras tombe lentement sur le caniveau.
En dessous, une grande flaque d'eau ou se reflète l'image de ce môme me regardant sans mots dire, m'accompagne. Une image brouillée petit à petit par un fluide rougeâtre s'écoulant de mon poignet dans son immensité. L'image s'efface avec moi qui ne suis plus retenu pas rien. Ensemble nous somme passé outre les lois de la nature, de la morale, partis pour enfin ne plus être.